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Avec la fin de l'encadrement, les propriétaires ont-ils remonté les loyers à Paris?

L'encadrement des loyers a été annulé fin 2017 à Paris

L'encadrement des loyers a été annulé fin 2017 à Paris - AFP

Les annonces immobilières postées sur les sites spécialisés affichent de plus en plus souvent des loyers plus élevés que les anciens plafonds prévus par la loi, selon une étude de CLCV. Il faudra pourtant attendre encore un peu pour savoir si les loyers ont vraiment augmenté dans la capitale.

Un peu plus de six mois après l'annulation de l'encadrement du niveau des loyers à Paris et à Lille, les propriétaires sont plus nombreux à proposer des loyers plus chers. C'est le constat dressé par CLCV dans une étude publiée ce mercredi. L'association de consommateurs a en effet étudié à la loupe mille annonces de location dans la capitale pour voir si les loyers proposés étaient au-dessus des anciens plafonds autorisés par la loi Alur. Au total, près de 52% des annonces épluchées proposent désormais des loyers au-dessus des anciens plafonds. En 2017, quand l'encadrement des loyers était encore effectif, seulement 39% des annonces ne les respectaient pas.

Le type de location, la façon de louer ou encore la taille du logement ne sont pas sans conséquence sur ce point. Ainsi, quand 47% des annonces affichent des loyers au-dessus des anciens plafonds pour les logements loués vides, cette proportion monte à 57% pour les locations meublées. En outre, les agents immobiliers ont tendance à diffuser des annonces moins chères. 43% des annonces proposées par les agences ont des loyers supérieurs aux anciens maxima. Quand il s'agit d'une location directe de particulier à particulier, 61% des annonces sont dans ce cas. Enfin, plus le logement est petit, plus cette tendance se renforce. Les loyers vont au-delà des anciens seuils pour 37% des logements de quatre pièces et plus proposés à la location, pour 42% des trois pièces, pour 49% des appartements de deux pièces et pour 58% des studios.

128 euros en plus par mois

Sur l'ensemble des annonces consultées qui dépassent les anciens maxima, les loyers sont en moyenne 17% plus élevés que les anciens plafonds majorés de la loi Alur. Cela représente 128,09 euros par mois en plus en moyenne, soit 1.537,08 euros sur une année entière. Des résultats qui sont assez proches de ceux de 2017. Autrement dit, si les loyers pratiqués au-dessus des anciens plafonds sont du même ordre en montant (ce que l'association CLCV appelle improprement un dépassement de loyer), il y a davantage d'annonces de ce type.

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Faut-il pour autant en déduire que les prix des loyers explosent à Paris? Ce n'est pas si sûr. Déjà parce que l'échantillon des annonces retenues par CLCV n'est pas nécessairement représentatif du parc de logements parisiens. Par exemple, CLCV prend 50% d'annonces de meublés et 50% d'annonces de logements vides. Or à Paris, les meublés représentaient 18,2% de l'offre locative privée en 2012, selon une étude de l'Inspection générale des Finances datant de 2016 ("Evaluation de politique publique : le logement locatif meublé").

Le juge de paix restera l'Observatoire des loyers de l'agglomération parisienne (Olap). Or, selon celui-ci, les loyers à la relocation avaient progressé de 2% dans la capitale en 2017 (contre une hausse estimée de 1% lors des premiers résultats de son enquête annuelle publiés en mai), alors que l'encadrement s'appliquait. Il faudra attendre le printemps prochain avant de savoir si les loyers de marché augmentent de nouveau fortement à Paris. Ainsi Clameur, qui regroupe les professionnels du secteur, et qui avait constaté une hausse de 1% des loyers de relocation à Paris en 2017, enregistre pour l'instant une… baisse des loyers de marché de 0,6% en 2018 dans la capitale.

L'encadrement des loyers bientôt de retour

L'encadrement des loyers, prévu à l'origine dans une trentaine d'agglomérations par la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (Alur), n'a été appliqué qu'à Paris dès 2015 et à Lille dès 2017. Or, ce dispositif a été annulé par la justice à Paris et à Lille fin 2017. Des jugements qui ont été confirmés en appel ces dernières semaines. Les propriétaires ne sont donc plus tenus de respecter les anciens plafonds fixés par arrêté préfectoral.

En revanche, deux autres formes d'encadrement des loyers s'appliquent toujours dans la capitale. Les loyers à la relocation ne peuvent être augmentés librement par rapport au bail précédent. Sauf réalisation de gros travaux entre deux locations ou loyer manifestement sous-évalué par rapport au marché, l'augmentation (en pourcentage) ne peut dépasser l'évolution de l'indice de référence des loyers (IRL). Et encore, si aucune revalorisation du loyer n'est intervenue au cours des douze derniers mois. Car un deuxième encadrement s'applique : pendant le bail, les loyers peuvent être révisés à la hausse annuellement mais là encore dans la limite de l'évolution de l'IRL (+1,25% sur un an au deuxième trimestre 2018).

L'encadrement du niveau des loyers, celui qui a été annulé par la justice, pourrait néanmoins faire son grand retour via le projet de loi Elan. L'article 49 prévoit qu'un encadrement des loyers pourra être appliqué dans les zones tendues de façon expérimentale pendant 5 ans et à la demande des villes. Un texte actuellement en lecture au Sénat et qui devrait être adopté définitivement cet été.

Jean Louis Dell'Oro