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Chambres de bonne : Loyers taxés au-delà de 40€/m²

Difficile de dire combien de logements seront concernés...

Difficile de dire combien de logements seront concernés... - Lansing - Fotolia.com

Les modalités du projet de loi contre les loyers abusifs dans les très petites surfaces ont été dévoilées. Détail d’une mesure que le gouvernement veut incitative, mais que ses détracteurs jugent symbolique.

Le gouvernement veut en finir avec les loyers abusifs dans les petites surfaces. Le projet de loi de finances pour 2012, qui sera présenté en Conseil des ministres le 28 septembre prochain, prévoit la mise en place d’une surtaxe progressive, imposée aux bailleurs louant pour plus de 40 euros du mètre carré des chambres de bonne de moins de 13 m².

Ces deux chiffres, conformes à ceux évoqués dès le mois de mars par Benoist Apparu, n’ont pas été pris au hasard. Le secrétariat d’Etat au Logement fait valoir que le seuil de 40 euros « reflète l’état du marché » parisien pour les logements les plus exigus, tandis que les 13 m² correspondent « peu ou prou à la surface en deçà de laquelle il est techniquement difficile d’inclure des éléments de confort comme des sanitaires, une douche et une cuisine ».

Barème d’imposition de 10 à 40 % du loyer

Le projet de loi prévoit que la taxe, assise sur le montant des loyers perçus au cours de l’année civile, entrera en vigueur le 1er janvier 2012. Elle s’appliquera à l’ensemble des baux, existants ou conclus après cette date, et selon un système de palier. Le taux de la taxe sera de :

  • 10 % si le montant du loyer mensuel, charges comprises, dépasse la valeur du loyer mensuel de référence de moins de 15 %. Soit les loyers dans une fourchette de 40 à 46 euros/m² ;
  • 18 % pour les loyers supérieurs de plus de 15 % mais de moins de 30 % au loyer de référence (46 à 52 euros/m²) ;
  • 25 % quand la différence excède 30 % mais ne dépasse pas 55 % (52 à 62 euros) ;
  • 33 % pour les loyers supérieurs de plus de 55 % mais de moins de 90 % au loyer de référence (62 à 76 euros) ;
  • 40 % pour les loyers dépassant la norme de plus de 90 % (loyers de plus de 76 euros/m²).

Une rentabilité réduite

Prenons le cas extrême d’une chambre de 10 m² qui serait louée 800 euros par mois (soit un loyer de 80 euros/m², deux fois supérieur au loyer de référence). A compter du 1er janvier prochain, son propriétaire devra verser au titre de ce loyer une taxe de 320 euros (800 x 40 %). A première vue, il lui restera donc 480 euros, soit toujours 80 euros de plus que s’il applique effectivement le loyer de référence… « Il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’une surtaxe, qui viendra s’ajouter à l’impôt que le propriétaire verse sur ses revenus fonciers », fait-on valoir au secrétariat d’Etat au Logement. Ainsi, si ce même propriétaire est imposé à 25 %, il acquitte déjà un impôt de 200 euros [800 x 25 %] sur les revenus qu’il tire de sa location. Il payera donc un total de 520 euros (320 +200 euros), et ne conservera in fine que 280 euros. « Si, au contraire, il accepte de ramener le montant de son loyer à 40 euros/m², non seulement il ne sera imposé qu’à hauteur de 100 euros au titre de ses revenus locatifs [400 x25 %], mais il ne devra acquitter aucune surtaxe ». Et conservera donc 300 euros sur le loyer qu’il perçoit. « Le but du dispositif n’est pas de dégager des recettes supplémentaires ni de faire perdre de l’argent aux propriétaires, ajoute le secrétariat d’Etat au Logement, Il ne s’agit que de les inciter à pratiquer des loyers plus raisonnables, et ainsi mettre fin aux pratiques abusives ».

Si, pour l’heure, le dispositif ne doit s’appliquer qu’à Paris intra-muros, le gouvernement n’exclut pas de l’étendre à d’autres grandes villes, selon des modalités qui restent à définir. « Rien n’est encore arrêté, mais dans ce cas nous devrions fixer d’autres loyers de référence adaptés aux différents marchés locaux. 40 euros du m², ça ne correspond à rien à Lyon ou à Strasbourg, par exemple », poursuit le ministère. Le dispositif pourrait aussi ne s’appliquer qu’aux villes de la zone A bis, qui regroupe Paris et l’Île-de-France, et où les excès sont les plus flagrants.

Une micromesure ?

Difficile d’évaluer le nombre de propriétaires qui paieront la nouvelle taxe. Au secrétariat d’Etat, on recense 48 704 logements de moins de 13 m² actuellement en location en France, dont environ 40 % (20 289) sont situés à Paris. Reste à savoir combien sont effectivement loués à des loyers abusifs. L’Observatoire des loyers parisiens (Olap) mentionne un loyer moyen de 23 euros/m² à Paris intra-muros pour les T1*. Loin, donc, des 40 euros retenus par le gouvernement. « Mais cette moyenne ne distingue pas entre les grands studios et les microsurfaces », indique-t-on en interne. Sans oublier que l’observatoire ne prends en compte que le parc de logements loués vides, quand la plupart des chambres de bonnes sont meublées... L’économiste Michel Mouillart, spécialiste du logement et président de l’observatoire Clameur** estime pour sa part que 300 studios à peine tomberont sous le coup de la surtaxe.

De quoi ajouter de l’eau au moulin des associations de défense de locataires, qui dénonçaient dès le mois de mai le manque d’ampleur du projet, ou du Parti socialiste, partisan d’un encadrement global des loyers.

Retrouvez les prix des loyers au m², ville par ville

*Evolution en 2010 des loyers d’habitation du secteur locatif privé, dans l’agglomération parisienne, publié au mois de mai dernier. Les loyers payés par les nouveaux locataires, en place depuis moins d’un an, sont évalués à 25,2 euros/m²

**Connaître les loyers et analyser les marches sur les espaces urbains et ruraux

Emmanuel Salbayre