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Location : L'UFC dénonce les "pratiques abusives" des agences

Un affichage pas toujours complet, des honoraires trop élevés...

Un affichage pas toujours complet, des honoraires trop élevés... - dr

La dernière enquête de l’UFC-Que Choisir écorne l’image des agents immobiliers, accusés de « pratiques abusives » et « bien peu louables » à l’encontre de leurs clients locataires. L’association de consommateurs demande des sanctions et une réforme législative.

L’étude, menée à la fin de l’hiver, a porté sur un échantillon de 1 056 agences, visitées anonymement par des bénévoles de l’UFC. Prétendant rechercher un T2 d’une surface d’environ 40 mètres carrés, les faux candidats à la location présentaient un dossier qualifié de « correct » par l’association, avec des revenus trois fois supérieurs au montant du loyer exigé, mais sans garant extérieur. « Le ratio des 30 %, communément pratiqué dans d’autres secteurs (comme le crédit) étant atteint, l’exigence d’une caution n’est pas justifiée », indique l’UFC. Dans 28 % des cas, l’absence de garant a pourtant été jugée problématique par les agents, 14 % d’entre eux allant jusqu’à affirmer à leur client qu’il ne saurait y avoir de transaction sans caution extérieure… L’association dénonce une « quête excessive de garantie », qui « souligne clairement le fait que les agences sont avant tout au service du bailleur ». L’enquête révèle ainsi que ces mêmes agents « se sont bien gardés de dire au locataire qu’ils allaient proposer au bailleur de prendre une assurance loyer impayé » - qui dispense de recourir à un garant extérieur - ou qu’il avait lui-même la possibilité de solliciter une caution bancaire ou une caution entreprise.

Des agences un peu trop zélées…

Dans le même ordre d’idée, 62 % des agences étudiées ont demandé à leurs clients un ou plusieurs documents que la loi* leur interdit pourtant de faire figurer dans leurs dossiers. Il s’agit la plupart du temps d’une attestation de l’employeur du candidat à la location (46 % des cas), mais certaines agences n’hésitent pas à exiger une photographie d’identité (10 %), une autorisation de prélèvement automatique, voire un chèque de réservation du logement (4 %)… L’UFC constate que « la demande d’au moins un documents interdit est plus souvent le fait des agences de réseaux ». Toutes enseignes confondues, la part des contrevenants monte à 64 %, et « ce type de pratique est très courant dans les agences des groupes Foncia (74 %) et Guy Hoquet (75 %) », ajoute l’enquête.

Des services limités… et chers

« En soi, ce n’est pas forcément gênant que les agences soient au service des bailleurs, estime Alain Bazot, président d'UFC-Que Choisir. Mais dans ce cas, pourquoi font-elles payer des honoraires aussi élevés aux locataires ? ». C’est le deuxième point soulevé par l’étude : le montant de la facture pour les candidats à la location est souvent disproportionné au vu de la qualité du service rendu, et « déconnecté de toute logique économique ». En moyenne, les honoraires, ce qu’on appelle communément les frais d’agence, sont équivalents à près d’un mois de loyer hors charges (93 % en moyenne, dont 84 % pour les indépendants et 95 % pour l’ensemble des réseaux). Or, l’UFC fait valoir que seule la rédaction du bail, qui relève d’« une procédure standardisée », ne devrait être à la charge du locataire - et encore pour moitié, l’autre incombant au propriétaire. Pis, dans 94 % des cas, « la logique est à l’indexation du montant des honoraires sur les loyers ». Autrement dit, au sein d’une même agence, un appartement avec un loyer plus élevé induit des montants d’honoraires plus coûteux pour le locataire.

Manque d’information

Pour compléter le tableau, l’UFC dénonce un respect approximatif de l’obligation d’affichage de l’étiquette énergétique des logements, en vigueur depuis le 1er janvier. « Seules 72 % des agences affichent systématiquement le Diagnostic de performance énergétique (DPE), 18 % ne le font que parfois, et 10 % ne le font pas du tout », constate l’enquête. Un manquement d’autant plus dommageable que « compte tenu de l’explosion des tarifs de l’énergie, cette information devient primordiale ».

L’UFC veut des sanctions, Apparu promet « des mesures »

Face à l’ensemble de ces constats, l’UFC a alerté la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), afin qu’elle procède à des contrôles d’agences immobilières et prennent des sanctions contre les pratiques illicites, le cas échéant. L’association en appelle en outre au gouvernement, auprès duquel elle sollicite la mise en place d’une « réforme législative ambitieuse », qui instaurerait notamment un plafonnement des honoraires pour la rédaction du bail et une meilleure information concernant l’état des lieux. « Nous comptons profiter du projet de loi de Frédéric Lefebvre [du nom du secrétaire d’Etat chargé à la consommation, sur les droits, la protection et l’information des consommateurs – remis le 1er juin dernier, NDLR] pour nous faire entendre », a indiqué Alain Bazot.

Interrogé par l’AFP, Benoist apparu, secrétaire d’Etat au Logement, a reconnu que « les dérives constatées […] ne sont pas acceptables », et a indiqué, sans plus de précision, que « le gouvernement prépare des mesures pour protéger les consommateurs et ceux des professionnels qui s’engagent sur la qualité du service rendu ». Au passage, le ministre a estimé qu’il ne fallait pas « jeter l'opprobre sur toute une profession qui consciente de certaines dérives a organisé une réflexion pour lutter contre ces abus ».

*Loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs

Emmanuel Salbayre