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Assurance emprunteur : un sénateur veut forcer les banques à jouer le jeu de la concurrence

Les banques rechignent à répondre à une demande de résiliation d'assurance emprunteur.

Les banques rechignent à répondre à une demande de résiliation d'assurance emprunteur. - AFP

Les emprunteurs ont souvent bien du mal à résilier leur assurance emprunteur. Un sénateur propose de renforcer la législation pour obliger les banques à informer leurs clients et à rapidement s'exécuter.

Accusées de traîner des pieds lorsque leurs clients ayant un crédit immobilier veulent changer d'assurance emprunteur, les banques sont dans le collimateur d'un sénateur. Le socialiste Martial Bourquin a déposé le 3 avril une proposition de loi au Sénat en vue de "renforcer l'effectivité du droit au changement d'assurance emprunteur" dans le cadre d'un crédit immobilier.

Le sénateur du Doubs était déjà l'origine de l'amendement dit Bourquin permettant, depuis le 1er janvier 2018, de changer d'assurance pour tous les emprunteurs à la date anniversaire du contrat. Mais ce dispositif n'a pas eu le succès escompté. Il faut dire que les banques n'ont aucun intérêt à jouer le jeu, alors que 87,5% des emprunteurs étaient assurés dans le cadre d'un contrat signé avec leur établissement prêteur en 2017, selon l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR).

Pour leur forcer la main, Martial Bourquin propose trois principales mesures, comme le rapporte notamment BFM Business. Premièrement, clarifier la date anniversaire des contrats. Car les banques ont chacune leur interprétation : pour certains établissements c'est la date de signature de l'offre de prêt, tandis que pour d'autres c'est la date d'édition de l'offre ou celle de demande d'adhésion qui font foi. Bref, difficile de s'y retrouver pour les clients qui doivent envoyer une lettre recommandée à leur banque au moins deux mois avant la date en question. Martial Bourquin estime que le plus simple est de fixer une date unique pour tous les contrats en cours : celle de la signature de l’offre de prêt par l’emprunteur. Sur ce point, les banques s'étaient déjà engagées à mettre en place une date unique à compter du deuxième semestre 2019, comme le rappelle Le Monde. Mais ce serait une façon de le graver dans le marbre.

Vers une politique de "name and shame"

Deuxièmement, les banques devront transmettre à leurs clients la date anniversaire de leur contrat d'assurance emprunteur tous les ans. Si elles ne respectent pas cet engagement, les emprunteurs pourraient alors résilier leur assurance à tout moment. En outre, les établissements s'exposeraient à une amende de 1.500 euros à chaque omission.

Troisièmement, le sénateur du Doubs propose de pratiquer le "name and shame", c'est-à-dire de diffuser une liste des "décisions prononcées à l’encontre des prêteurs condamnés".

Une proposition bien accueillie par les spécialistes de la délégation d'assurance. "Apporter des précisions sur la date d’anniversaire serait bénéfique. En effet, le flou autour de cette date a laissé la porte ouverte aux banques, qui se livrent à des pratiques abusives depuis des mois afin de retenir leurs clients", juge dans un communiqué Astrid Cousin, porte-parole du courtier Magnolia.fr. "Le vrai problème reste le manque de communication auprès des emprunteurs sur leurs possibilités de résiliation. Cela sera donc très positif d’informer l’emprunteur chaque année de la date d’anniversaire afin de faire valoir son droit", ajoute-t-elle. "Le "name and shame" est selon Magnolia.fr le point crucial de cette loi. Comme les sanctions financières ne sont pas dissuasives et que les établissements préfèrent payer qu'être nommés, ce serait le seul moyen de pression qui pourrait fonctionner", estime-t-elle par ailleurs.

7.500 euros de gains par dossier

Le changement d'assurance emprunteur peut conduire à des économies substantielles sur l'ensemble de la durée d'un crédit immobilier. Magnolia indique ainsi que ses 4.000 clients qui ont profité de l'amendement Bourquin ont pu économiser 30 millions d'euros. Soit 7.500 euros de gains par dossier en moyenne.

Reste que si ce gain est réel dans la durée, il pèse parfois finalement peu chaque mois, ce qui n'incite pas toujours les clients à entamer des démarches compliquées avec leur banque. Par exemple, un gain de 5.000 euros pour un couple qui a emprunté sur 20 ans ne représente qu'un peu plus de 10 euros d'économies par mois et par personne.

Jean Louis Dell'Oro