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"Courtage en crédit immobilier : l'avenir du consommateur", par Philippe Taboret

Philippe Taboret, directeur général adjoint de Cafpi

Philippe Taboret, directeur général adjoint de Cafpi - dr

Une tribune du directeur général adjoint de Cafpi, sur l’utilité des courtiers en crédit immobilier.

A quoi servent les courtiers en crédit immobilier ? A ce jour, une proportion importante des ménages qui ont des projets d'accession ou d'investissement se la posent pour considérer finalement que le service apporté est indispensable : près d’un prêt immobilier sur quatre est conclu grâce à l'intervention d'un intermédiaire. Bien sûr, dans la banque comme dans tous les secteurs d'activité, la place de l'intermédiaire éveille des questions : où est sa valeur ajoutée ? Constitue-t-il un maillon de plus dans la chaîne, sans justification ?

Ceux qui recourent à nous ont essentiellement deux préoccupations : bénéficier d'une négociation efficace sur les taux, et confier leur dossier à un bon avocat de leur cause. Sur ce point en effet, l'opinion, sans être avisée au jour le jour des évolutions du monde bancaire, sait qu'il s'agit d'un écosystème instable... Quelques repères du moment sur ces sujets, les taux et la politique de distribution.

Les taux, après avoir été haussiers pendant plusieurs mois, se détendent, sous l'effet de l'injection d'abondantes liquidités par la Banque centrale européenne (BCE) pour aider l'Espagne et la Grèce à emprunter dans des conditions digestes. L'effet sera de courte durée... notamment parce que les banques vont devoir rembourser cette dette à court terme envers la BCE.

Les taux, sans qu'on puisse prédire si ce sera dès ce second semestre, vont remonter. Les courtiers sont des observateurs fins des évolutions de taux et de leurs déterminants, et savent négocier au mieux des intérêts des clients.

La politique de distribution, à cause du durcissement des ratios de solvabilité (Bâle III), et tout simplement du fait de l'affaiblissement du système bancaire mondial, est en train de se dégrader. Le choix d’une banque s’avère délicat. Exigences majorées d'apport personnel, regard plus sévère quant à la situation de l'emprunteur, le contexte rend indispensable l'intervention du courtier, qui remet de la raison où se glisse la passion du prêteur, animé par ses peurs propres.

Ce d’autant plus que l’emprunteur se retrouve aujourd’hui face à des montages complexes. Il se retrouve souvent désarmé face aux possibilités qui lui sont proposées. Prêts aidés, taux fixes et taux variables, assurance emprunteur…, sont autant de paramètres à prendre en compte pour obtenir la meilleure offre de crédit possible. Seul un courtier est capable d’accompagner les emprunteurs au milieu de ce labyrinthe.

On sent bien en tout cas que le courtier a un rôle essentiel et sensible. Jusqu'alors, le public pouvait s'interroger sur ses compétences, et le législateur lui-même s'est penché sur le sujet dès 2010, instaurant par la loi un statut à part entière à ces opérateurs. Le décret d'application de ce texte, signé le 26 janvier 2012, vient préciser les choses. Désormais, le courtier, défini comme un mandataire indépendant des banques et au service de l'emprunteur, est immatriculé sur un registre unique, preuve de sa reconnaissance par les autorités bancaires.

En outre, les "intermédiaires en opérations de banque et en services de paiement" (IOBSP) sont désormais astreints à démontrer une aptitude professionnelle. Ils doivent indifféremment être titulaires d'une licence, ou attester d'une expérience de 2 ans comme cadre ou de 4 ans comme non cadre, dans l'univers bancaire, ou encore d'un parcours de formation continue spécifique.

Cette réforme historique de notre statut a été menée à marches forcées, parce que, dans le contexte économique troublé du moment, il était essentiel que les emprunteurs soient rassurés par le sérieux des acteurs professionnels à leur service. Elle entrera en vigueur dès la mi-2013, échéance à laquelle tous les intermédiaires en crédit devront s'être déclarés auprès de l'ORIAS (Organisme pour le registre des intermédiaires en assurance), ou l'avoir été par les banques avec lesquelles ils travaillent, et avoir justifié de la capacité professionnelle requise.

En l'absence d'enregistrement, des sanctions pénales seront prononcées à l'encontre des courtiers, pour exercice illégal du métier d'intermédiaire en opérations bancaires, mais la responsabilité des banques correspondantes sera également mise en cause. Le manquement aux obligations de compétence sera lui aussi sanctionné par les autorités de tutelle.

Bref, utilité économique et sécurité pour le consommateur constituent une équation vertueuse, et les courtiers en crédits immobiliers en attendent un accroissement de leur place sur le marché. Ils pourraient bien voir leur taux de pénétration augmenter de 5 à 10 % par an, selon les estimations les plus conservatrices. Les prêteurs comme les emprunteurs y gagneront : au bout du compte, nous sommes des tisseurs de liens de confiance et des réassureurs. L'achat immobilier, qui est l'acte à plus forts enjeux pour les ménages et pour les banques, mérite bien ce soin.

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